William PLAYFAIR : La France telle quelle est, et non la France de Lady MORGAN ; ouvrage traduit de langlois par lauteur des observations sur la France de Lady MORGAN (Jean-Baptiste DEFAUCONPRET). Paris, H. Nicolle, 1820.
Fort in-8, broché, non rogné, tel que paru, VIII + 470 pp. (petites rousseurs éparses).
Bonne condition générale. Edition originale.
Lattrait de la révolution française exerce sur lIrlande asservie une aspiration de liberté et cela donne à la romancière irlandaise Sydney OWESON (Lady MORGAN) lidée décrire un livre sur la France. Elle a pour but dentreprendre le voyage dans un authentique but dobservation et denquête. Elle et son mari prirent la route du continent européen peu de temps après que celui-ci eut été rendu de nouveau accessible aux britanniques.
La France que découvrit Lady MORGAN en 1816 était une France pratiquement débarrassée de son anglophobie. La chute de lempire suivie de la période impériale contribua à ce fait. Cest à cette époque que les français prennent pour la première fois une connaissance profonde de la littérature anglaise. Dans un Paris "post Napoléonien" son voyage est placé sous le signe de la découverte de la littérature et du combat pour la liberté. Le bourgeois y évince le chevalier. A ces bourgeois elle préférera les aristocrates et les paysans et son attitude sans préjugés lui permettra dentrer dans les milieux auxquels bien peu détrangers avaient eu accès jusque là.
Lady Morgan et son mari passèrent 5 mois en France, laps de temps où ils furent très actifs, visitant, écoutant, y rencontrant des personnalités importantes (Humboldt, labbé Grégoire, Vivant-Denon, Mme de Genlis, Cuvier, Ségur, le marquis de La Fayette qui deviendra leur ami intime...).
De retour à Dublin Lady Morgan entreprit de mettre en forme toutes ses notes. En juillet 1817 la France de Lady Morgan est publié. Il marque lengagement politique de son auteur, sefforce de donner une idée des bienfaits de la révolution de 1789, elle souligne les maux et injustices restaurés en même temps que la monarchie, elle fournit des renseignements sur les moeurs des français...
Le succès sera considérable mais la traduction française fut censurée (nombreuses suppressions, additions). Plusieurs pamphlets virent le jour et William PLAYFAIR (1759-1823) dans la France telle quelle est, met laccent sur les faiblesses de Lady MORGAN. Il lui reproche ses tableaux romantiques décrivant une France imaginaire. Playfair accuse la France davoir ravagé lEurope avec des armées de terre, davoir maltraité ses ennemis. Il y oublie son système dimpartialité qui lui fait dire quun jour les principes libéraux chargèrent en monstres 20 millions de français tout en ajoutant que leur caractère est fort bon et quil na pas changé. Il rend justice à la multitude détablissements gratuits de la France et à lindustrie plus ingénieuse qui la distingue. Il examine dun oeil sévère la charte française, impraticable, incomplète, impossible à respecter, loi selon lui que lon viole chaque jour de plus en plus. Il parle de la stipulation admirée par laquelle les anglais jugèrent à propos de supprimer la traite des noirs... Mais au final louvrage contient assez de renseignements pour offrir aux vrais français le motif daimer leur pays.
Lécossais PLAYFAIR naquit près de Dundee. Cet ingénieur et économiste politique servi dagent secret pour le compte de la Grande-Bretagne durant sa guerre avec la France. Playfair est le fondateur des méthodes graphiques de statistiques et inventa plusieurs types de diagrammes dont lhistogramme des données économiques et le diagramme circulaire. En 1787 il sinstalle à Paris et prend part à la prise de la Bastille. En 1793 il établit en tant quagent secret une maison de banque de sécurité visant à organiser une opération clandestine de contrefaçon dassignats pour détruire la monnaie française mais échoua totalement. Il proposa également à son gouvernement diverses opérations clandestines pour renverser le gouvernement français. Il quitte la France puis y refait surface en 1814 comme attaché à la rédaction du "Galignanis Messenger". Il eut une variété de carrière incroyable : mécanicien de chantier, ingénieur, dessinateur, comptable, inventeur, orfèvre (échoua dans ce rôle), marchand, courtier en investissements, économiste, staticien, pamphlétaire, traducteur publicitaire, spéculateur financier, banquier, royaliste ardent, rédacteur en chef, journaliste ; mais ses pairs le jugèrent comme un véritable scélérat et il mourut dans la misère.